La semaine dernière nous avons examiné comment une personne pénalement poursuivie peut être préventivement détenue par le Juge d’instruction et comment s’achève cette mesure d’information. A présent il convient d’analyser la détention préventive, non plus comme une mesure d’enquête judiciaire mais comme une mesure de sureté avant le jugement.
La détention est alors conçue comme une mesure de dernier ressort, ayant pour finalité unique de protéger la société et de veiller à ce que les délinquants soient bien présents à leur procès.
- La détention préventive devant le tribunal correctionnel
Lorsque le mis en cause est déféré au parquet pour des faits délictuels simples dont le jugement ne nécessite pas d’investigations complexes, le Procureur du Faso a la possibilité de le traduire devant la chambre correctionnelle suivant la procédure de flagrant délit (art. 52, 69 et 393 du Code de Procédure Pénale). En général ce moyen de mise en œuvre de l’action publique est utilisé pour les faits de délit (vol, escroquerie, recel, coups et blessures… sans circonstances aggravantes), ou pour les actes de grand banditisme (attaque à mains armées) ou encore pour les violences à l’égard des femmes ou des filles (viol, harcèlement sexuel, rapt de femme, etc.).
Le Procureur du Faso apprécie, après l’opportunité
de la poursuite, celle de la détention. S’il décide de ne pas garder le
prévenu, il le libère sur le champ sans aucune formalité. Par contre, s’il
décide de le garder, il le lui notifie à l’issue de son interrogatoire et signe
un mandat de dépôt (pour les majeurs) ou un ordre de garde provisoire (pour les
mineurs).
L’intéressé est dit prévenu et est conduit à la maison d’arrêt en vertu du
mandat de dépôt. Le secrétariat du parquet se chargera de la préparation de
l’entier dossier sous les instructions du procureur ou ses substituts et de
l’enrôlement (programmation) à la plus prochaine audience de flagrant délit.
Seule une décision du tribunal mettra fin à cette détention.
Cette détention préventive est une mesure de sureté destinée principalement à
assurer la représention du prévenu devant le tribunal mais les raisons évoquées
pour la détention préventive devant le Juge d’instruction valent également ici.
De manière succincte, on ne peut enfermer une personne avant son procès qu’en
présence d’indices graves d’imputabilité de faits infractionnels ainsi que de
sérieuses raisons de penser que si l’intéressé est laissé en liberté, il risque
de fuir pour échapper à sa responsabilité pénale, de commettre un autre délit,
ou encore de faire obstacle à la justice en effaçant les preuves ou en
subornant les témoins ou enfin constituer un danger pour la communauté. La
détention préventive n’est donc pas une forme préliminaire de sanction, puisque
malgré les poursuites, le prévenu est présumé innocent, tant qu’il n’a pas été
condamné (article 9.3 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques).
- La Mise en liberté provisoire par le tribunal correctionnel
Au jour fixé, l’individu arrêté et placé sous mandat de dépôt, est traduit à
l’audience de la chambre correctionnelle (Art. 393 CPP).
Dans le cas où l’affaire est en état de recevoir jugement, le tribunal retient
le dossier, procède à son jugement au cours d’un débat contradictoire et
public, à l’issue duquel il rend sa décision, le même jour ou s’il le faut, à
une autre date. On dit dans ce dernier cas que l’affaire est mise en délibéré.
Si par contre l’affaire n’est pas en état de recevoir jugement, le tribunal en
ordonne le renvoi à l’une des plus prochaines audiences pour plus ample
information et, s’il y a lieu, met le prévenu en liberté provisoire, avec ou
sans caution (art. 397 CPP) par un jugement appelé jugement avant dire droit.
On peut donc noter que le tribunal apprécie l’opportunité du maintien du
prévenu en détention soit d’office soit à sa demande ou celle du Ministère
public. Pour ce faire il aura égard à la gravité des faits, aux garanties de la
représentation du prévenu, à la solidité des éléments de preuve contre le
prévenu, à son profil, notamment son passé ou sa personnalité, etc. Le prévenu
ainsi libéré devra comparaitre libre à toutes les audiences du tribunal.
Dans ce cas le Procureur du Faso établira un Ordre de Mise en Liberté et la
Maison d’Arrêt et de Correction procédera à l’exécution de cette instruction
tout en veillant à informer le parquet en lui envoyant l’avis de libération.
S’agissant des décisions pouvant intervenir à l’issue des débats, il faut
indiquer pour l’essentiel que si la juridiction estime que les faits sont
constitués, elle prononce la peine. Au cas où le condamné n’a pas fait l’objet
de condamnation antérieure (c’est-à-dire qu’il a un casier judiciaire vierge),
le tribunal peut ordonner le sursis à l’exécution de la peine (Art 694 CPP). En
cas de condamnation à la prison ferme, la durée de la détention préventive est
déduite de la peine prononcée. Si par contre, le tribunal estime que les faits
ne constituent pas une infraction ou s’il y a des doutes, il relaxe le prévenu.
Toutefois, en raison du principe du double degré de juridiction qui gouverne le fonctionnement de la justice, toute personne qui a perdu un procès en première instance, peut saisir la juridiction d’appel pour faire rejuger la cause. Il s’agit d’une garantie de bonne justice. Par conséquent, le condamné, le Procureur du Faso et la victime peuvent faire appel et l’affaire sera portée devant la Cour d’appel qui est la juridiction hiérarchiquement supérieure aux juridictions de première instance.
Parquet près le Tribunal de grande instance de Ouagadougou